Les Virgules d'Aëmell

Les Virgules d'Aëmell

Mes textes


Cruelle séparation

Texte soumis à un concours régional sur le thème "simple" de "La Prose". N'a pas été retenu (comme d'hab')

J'espère que vous allez tout de même aimer.

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Je chancelle. Je ne veux pas te quitter. Pourquoi devrions-nous nous éloigner l’un de l’autre ? Tu es tout pour moi. Laisse-moi rester encore un instant dans tes bras. Ne m’abandonne pas. Nous avons vécu tellement de choses ensemble, à la limite du réel. Tu m’as donné des ailes, tu m’as permis de voler. Je pouvais réaliser tous mes rêves. Dans tes bras, rien ne me semblait impossible. Mais maintenant, tout cela est fini. Peut-être ne volerai-je plus jamais ?

Je me lève. Encore une journée sans toi. Je traîne les pieds jusqu’à la salle de bains et tente de me faire belle en pensant à toi. Je m’habille, je mange sans joie. Ma mère m’interpelle : il paraît que j’ai l’air endormie. Non, mes yeux sont juste voilés par ton souvenir.

Je sors de la maison ; il fait froid. Il faisait toujours chaud dans tes bras. Le vent manque de m’emporter. Je dois avancer. Bientôt, j’arrive à l’arrêt de bus. Je m’installe et ferme les yeux, je suis fatiguée. Je pense à toi. Quand le bus s’arrête devant la gare, je descends. Le froid mordant me rattrape. J’attends, vingt minutes durant, le train qui doit m’emmener au lycée. Et pendant ce temps je pense à toi. Les phares aveuglants trouent l’horizon. Les roues crissent. Le cheval de fer ralentit et, bientôt, ouvre ses portes. Comme chaque jour, aucune place assise n’est libre. Je m’accroche à une barre. Pendant le trajet, je lutte pour ne pas fermer les yeux. Je ne dors plus beaucoup ces temps, car j’ai peur d’arriver au lendemain où je remarquerai que je suis à nouveau sans toi. Eh oui, je pense encore à toi.

Encore tout le long du chemin vers le lycée, tu es dans mes pensées. Je me traîne. Je suis seule, sans toi. Le chemin est plus long, et quand j’entre dans le bâtiment, je ne suis pas tout à fait là ; mon esprit est encore un peu avec toi, mais mon corps t’a quitté.

Sur un banc, la tête dans les bras, j’écoute distraitement les cours, je suis si fatiguée. Que le temps me semble long et tout ce temps je pense à toi. Le temps de quitter l’école arrive tranquillement. Le chemin en sens inverse s’étend encore plus longuement. Le train est déjà là, je monte. J’ai de la chance, une place libre se présente. Je m’affaisse. J’aimerais tellement te retrouver et dormir aussi. Je ne pense à rien d’autre qu’à toi et cette pensée me fait du bien. Je ne vois presque pas le reste du chemin. Train, bus, marche.

Je suis enfin chez moi. Je me précipite dans ma chambre. J’ai de l’espoir, et cet espoir n’est pas vain ! Tu es là, devant moi ! C’est tellement merveilleux, si merveilleux que je n’ose pas y croire ! Je m’avance vers toi, tu m’ouvres tes bras. Alors je ne résiste pas ; je m’y abandonne. Je suis tellement heureuse de te retrouver, mon lit !


01/06/2014
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En voie de disparition

Ce texte a été écrit pour un appel à textes sur le thème de l'apocalypse. Il a été refusé.

Je vous le livre donc ici.

Vos avis m'intéressent.

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Ouf, sauvés ! Nous étions rassemblés, moi, ma famille, mes amis et tous les gens du coin, dans un abri sous la terre, creusé il y a bien longtemps. Peut-être en prévision de ce jour ? La terre avait tremblé, le ciel s'était obscurci pendant qu'une fumée âcre se répandait partout. Des compagnons avaient toussé à en cracher leurs poumons, d'autres étaient morts sur le coup. Nous avions commencé à courir, de toute la vitesse de nos jambes. Nous avions connaissance d'un abri, mais encore fallait-il l'atteindre. Au loin, des bruits de chute d'arbres nous avertissaient que l'endroit n'était pas sûr. Après maints et maints détours, nous étions parvenus – mais dans quel état ? – à cette grotte qui est presque le centre de la terre pour nous qui sommes habitués à vivre en surface. Nous nous regardions. Il y avait eu beaucoup de pertes. Nous avions des blessés que nous ne pouvions pas soigner. Heureusement, toute ma famille était là, et mes amis les plus proches aussi. Mon dieu non ! Je ne voyais pas mon petit frère, Revan !

Sans réfléchir je fonçai vers la sortie. Il fallait absolument le retrouver avant que l'extérieur ne soit invivable !

Le chef de notre clan s'interposa :

- Que fais-tu petit ? Tu ne penses quand même pas sortir ?

- Revan n'est pas là ! Je vais le chercher !

- Ce n'est pas prudent... Nous ne savons pas ce qui se passe. L'extérieur est peut-être devenu invivable !

Je l'écartai sans le laisser finir. Jamais je ne laisserai mon petit frère ! Avant que je ne pénètre dans le tunnel qui permettait de remonter à la surface, mon père m'avait rejoint.

- Que fais-tu ? Où est Revan ?

- Il n'est pas là ! Je vais le chercher.

Il me regarda de ses beaux yeux bruns.

- C'est de la folie. Mais pas question de l'abandonner. Je viens avec toi, fils !

Alors commença la longue remontée vers l'extérieur. À l'approche de notre forêt, des bruits commencèrent à parvenir à nos oreilles. Les arbres semblaient s'effondrer de partout, faisant trembler la terre. Puis les étranges fumées opaques s'infiltrèrent et nous sûmes que nous étions proches du but. Des feuillages se présentèrent au-dessus de notre tête. Nous traversâmes ces buissons pour enfin nous retrouver à l'air libre... l'air qui semblait s'être transformé en sable. Irrespirable. Nous prîmes une grande inspiration d'oxygène pur dans les buissons avant de détaler. Il y avait eu un bruit, qui continuait, semblant vibrer de toute l'énergie de la forêt, sur la droite. Nous nous hâtâmes à gauche. À bout de souffle, après avoir retenu longtemps notre oxygène dans nos poumons, nous arrivâmes dans un coin plus calme. L'air sablé se dispersait, les arbres étaient encore debout. Seuls persistaient les bruits, assourdissants, de fin du monde.

- Quel est donc cette atrocité que nous envoie Mère Nature ? Ses créations, ses arbres meurent !

Je ne comprenais pas, moi non plus, ce qui se passait. Jamais je n'aurais imaginé qu'il puisse régner dans notre forêt une telle atmosphère de terreur.

Ce bruit à répétition s'arrêtait parfois, laissant planer un silence mortel. Aucun oiseau n'avait le temps de reprendre le dessus. D'ailleurs ils étaient tous parti depuis longtemps. D'un simple battement d'aile, ils s'étaient soustraits à cette apocalypse. À moins qu'elle ne se propage sur le monde entier !

- Revan ne peut être que vers la rivière, vers notre lieu de résidence. Il va falloir pénétrer à nouveau dans cette tourmente.

- Allons-y puisqu'il le faut... Mais comment respirerons-nous ? s'inquiéta, à juste titre, mon père.

Je repensai aux buissons, qui rejettent de l'oxygène pendant la photosynthèse.

- Fabriquons des masques en feuilles ! Avec un peu de soleil nous pourrons respirer.

- Essayons...

Nous fîmes comme il avait été dit. Des feuillages enroulés autour du cou et de la tête, nous avançâmes résolument dans l'océan de sable. Il fallait se dépêcher, l'oxygène aurait tôt fait de s'épuiser au fur et à mesure que nous nous enfoncions dans la pénombre de notre forêt d'ordinaire auréolée de soleil.

Malheureusement, en nous dirigeant vers notre rivière, nous allions droit vers le bruit. Plus tard, alors que l'air et la poussière commençaient à nous piquer les yeux, nous laissâmes le bruit un peu sur le droite pour être enfin en vue de la rivière.

Dans notre campement, il ne semblait pas y avoir âme vive, ni corps mourant. Tout était encore à sa place, comme figé. Nous étions parti si vite. Nos petits abri de feuilles et de branches étaient encore debout, recouverts de poussière cendrée poussée par le vent depuis une origine inconnue.

Revan ne devait pas être bien loin. Peut-être s'était-il caché ? Mais où ? Avait-il également pensé aux buissons pour respirer. N'y tenant plus, je me mis à l'appeler :

- Revan ! Revan !

Mon père se joignit à moi et nous criâmes son nom un peu partout. De la poussière s'infiltra dans nos voies respiratoires. Cet air avait vraiment une drôle d'odeur qui piquait les narines et montait à la tête. Je me sentais bien faible.

C'est alors que mon père éternua, toussa, cracha, comme nos amis qui ne s'étaient pas sauvés assez vite, ce matin. Il s'effondra sur le sol avant même que je n'ai pu réagir.

- Père ! Père ! Relève-toi !

Les feuilles avaient glissé. L'air de cette partie de la forêt était devenu tellement sombre que le soleil ne parvenait plus jusqu'à nous. Je commençais à suffoquer moi aussi. Il fallait partir d'ici. J'essayai de le porter, mais il était bien trop lourd pour moi. Et c'est le cœur battant et les larmes aux yeux que je m'éloignai entre les arbres morts qui jonchaient le sol, abandonnant le corps de mon père.

Mes larmes se mélangèrent à la poussière, je ne voyais plus rien, je ne pouvais presque plus respirer, mais j'appelais mon frère, avec tout le désespoir qui m'habitait.

J'entendis alors bouger, dans un bosquet plus loin devant moi. L'horizon était bien plus éloigné sans les arbres qui, d'ordinaire, modelaient notre vue. Un petit tête brune se dressa et me regarda. Il esquissa un sourire et se dépêtra des feuillages.

Mais apparut alors, au détour d'un arbre, un être monstrueux. Sa peau semblait toute plissée, aux couleurs trop foncées pour être vivantes, ses pieds étaient des formes simplifiées et ses bras... ! L'un était plus long que l'autre, circulaire et percé d'un trou, l'autre soutenait ce membre difforme. Et sur sa tête, point de cornes, mais une boîte pour cacher des poils trop longs et étrangement graisseux. La créature leva son bras trop long, comme pour désigner mon frère, proche de lui. Il serra son bras de l'autre main et une détonation retentit. Presque instantanément, un flot écarlate jaillit de la poitrine de Revan. Il fléchit les quatre pattes et tomba lentement, lentement... Et tandis que ma vue se brouillait, que je n'avais même plus la force de crier, d'autres monstres apparurent. Leur bras étaient également rallongés, mais par de grosses masses au bout plus fin, brillant et dentelé. Certains approchèrent leurs bras d'un arbre encore vivant et un bruit d'enfer retentit. L'arbre cria, vacilla et finit par s'écrouler, comme mon frère.

Il fallait partir, s'enfuir, prévenir le reste du clan. Je n'avais plus la force... On lança vers moi un objet, comme une pomme. Mais il s'en dégagea alors le même air sablé, déjà trop présent par ici, qui avait achevé mon père. Tout ça, juste sous mon nez, s'était trop. Je fléchis les antérieurs, mes sabots ricochèrent contre des pierres. Je fermai péniblement les yeux et à peine plus tard, je sentis qu'on me saisissait par mes bois pour me transporter vers mon frère, et l'arbre. Plus aucun ne bougeait. Et les monstres s'éloignèrent pour continuer leur tâche. Au loin, un autre arbre cria.

C'était la fin de notre monde, la forêt.


06/04/2014
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